L’Ocean Viking accostera finalement en France. Après plusieurs jours de bras de fer entre Paris et Rome, l’annonce a été officialisée jeudi par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, à l’issue du conseil des ministres. Le bateau humanitaire sur lequel se trouvent encore 231 migrants, secourus au large de la Libye il y a une vingtaine de jours trouvera refuge dans le port de Toulon, vendredi. Le locataire de la Place Beauvau a indiqué qu’« un tiers » des passagers allaient être relocalisés.
La situation reste très critique. À la mi-journée, trois migrants et un accompagnant de l’organisation non gouvernementale (ONG) SOS Méditerranée, qui a affrété ce navire, ont été évacués en urgence vers le centre hospitalier de Bastia (Haute-Corse), alors que le cargo se trouvait au large des côtes corses. Dans un état « grave », selon l’ONG, les réfugiés ont été pris en charge par un hélicoptère Puma de la base aérienne militaire 126 de Ventiseri-Solenzara avec une équipe médicale à bord. Cette opération a été conduite par la préfecture maritime de Méditerranée, sous l’égide du secrétariat général de la mer. « L’un des patients est instable et ne réagit pas aux soins prodigués à bord depuis le 27 octobre, a indiqué l’ONG. Les deux autres ont subi des blessures en Libye qui, en raison du long délai de traitement, risquent d’avoir des conséquences négatives à long terme. »
La Corse y prend sa part, suivant sa tradition d’hospitalité.Gilles Simeoni
Une cellule médico-psychologique a été activée au sein du centre de Bastia, indique, au Point, une source hospitalière. Les autorités se sont néanmoins refusées à tout commentaire au sujet de l’état de santé des migrants accueillis dans les services d’urgence. Dès mardi soir, le président du conseil exécutif de l’île, l’autonomiste Gilles Simeoni, avait offert l’aide de la Corse en proposant de mettre à disposition l’un de ses ports et d’apporter une aide humanitaire aux 234 passagers.
Cette annonce est intervenue alors que le navire se trouvait au sud de la Sicile et a entrepris de faire route vers la France en demandant assistance, après avoir essuyé un refus de la part des autorités italiennes. Paris avait alors dénoncé le « comportement inacceptable » de l’Italie, « contraire au droit de la mer et à l’esprit de solidarité européenne ». « On ne peut pas détourner le regard alors que des personnes sont dans une situation de détresse absolue à quelques kilomètres de nos côtes, explique Gilles Simeoni, au Point. Il y a aujourd’hui un impératif à apporter une aide d’urgence, indépendamment des difficultés à appliquer les règles et du jeu diplomatique qui ne peut pas se faire au détriment de la vie humaine. La Corse y prend sa part, suivant sa tradition d’hospitalité. La Méditerranée devient un cimetière, il y a urgence à ce que les États membres de l’UE trouvent un point d’accord face à cette crise migratoire en agissant conformément à ses fondamentaux. »
Le précédent de 2018
Cette prise de position n’est pas anodine. Alors qu’un processus de négociations est en cours avec l’État concernant l’avenir institutionnel de l’île, en particulier l’habilitation à légiférer de manière autonome, les nationalistes entendent affirmer leur capacité à décider de façon autonome, bien que l’accueil des migrants ne relève pas des prérogatives de la collectivité de Corse.
Cette crise leur donne également l’occasion de se démarquer des autres nationalistes européens en revendiquant une image « progressiste ». Un cas similaire s’était présenté dans l’île en juin 2018 avec le navire Aquarius et ses 629 migrants. Le gouvernement italien avait alors interdit l’entrée du bateau, qui appartenait à la même ONG, SOS Méditerranée, dans l’un des ports italiens. Tandis que la France avait également opposé un refus, Gilles Simeoni avait proposé de l’accueillir, avant que le cargo humanitaire ne soit contraint de rejoindre le port espagnol de Valence pour y trouver refuge.
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