Classés parmi les affections psychiatriques, les troubles des conduites alimentaires s’expriment de diverses façons : anorexie mentale, boulimie nerveuse et autres formes boulimiques, ou formes atténuées de ces pathologies.
Ces troubles débutent essentiellement à l’adolescence pour l’anorexie mentale et en début de vie adulte pour la boulimie. Ils touchent donc des personnes jeunes, en plein développement de leur vie. Autre drame de santé publique, seule la moitié des malades est actuellement prise en charge. Pour remédier à cette situation, les professionnels, et les usagers (familles et patients) concernés par les TCA se mobilisent depuis une vingtaine d’années pour tenter de mieux répondre à la demande de soins, animer des formations, des recherches et mobiliser les pouvoirs publics.
Dans ce contexte, les approches corporelles, qui visent à aider les patients à reconstruire une image réaliste de leur corps en s’appuyant notamment sur des pratiques telles que la danse, le yoga, la relaxation, la confrontation par vidéo et miroir ou les exercices physiques ont largement démontré leur efficacité.
Des troubles connus de longue date
Identifiés depuis la moitié du XIXe siècle pour l’anorexie mentale et dans les années 1980 pour la boulimie (avec ou sans contrôle du poids), ces syndromes sont désormais mieux connus. Pourtant, peu de gens savent qu’il s’agit des troubles psychiques qui présentent la plus grande mortalité, par dénutrition, carences ou suicides. Les premières études sur le sujet sont d’ailleurs relativement récentes, puisqu’elles datent de la fin des années 1990 en Angleterre. D’autres ont été menées ultérieurement, avec les mêmes résultats.
Les troubles alimentaires (tous degrés confondus) touchent 10 % des femmes, et l’on considère que 30 % des adolescents sont régulièrement soumis à des crises de boulimie ou d’hyperphagie. L’anorexie mentale se manifeste quant à elle typiquement pendant l’adolescence et principalement chez les filles. Elle est caractérisée entre autres par une sérieuse perte de poids et par des troubles de l’image du corps. Par ailleurs, 50 % des patients TCA, qu’ils soient anorexiques ou boulimiques, rapportent des antécédents conscients d’abus sexuel, de maltraitances ou de négligences.
Les formes mineures de TCA peuvent être le prélude à une aggravation et à l’installation d’une forme clinique caractérisée, avec risque de chronicisation. De plus la morbidité de ces troubles est importante, et se traduit par des complications médicales, des comorbidités psychiatriques et des conséquences délétères sur l’insertion et l’adaptation sociale.
Restaurer une sécurité de base défaillante
La problématique des TCA est bien résumée par Vincent Dodin, psychiatre à l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul et professeur à la faculté catholique de médecine de Lille. Selon lui,
« La naissance est une métamorphose qui nécessite que le tout petit développe, à l’intérieur de lui, une “ sécurité de base ” supportée par une forme de conscience de soi forte et stable, sur laquelle il pourra s’appuyer tout au long de son parcours socioaffectif. La qualité de cette sécurité interne dépendra aussi de la qualité des interactions corporelles et affectives tout au long du développement de l’enfant et lors de son adolescence. »
Dans l’anorexie et la boulimie, cette sécurité de base est défaillante et doit être restaurée. Toujours d’après Vincent Dodin, cette restauration passe par
« une prise en charge plurimodale où les thérapies à médiations sensorielles jouent un rôle essentiel. Les attentes sont le changement d’un rapport au corps qui ferait passer de la maltraitance à la bienveillance par une prise de conscience des éprouvés et des besoins corporels. »
Les limites de cette approche seraient, toujours selon le Pr Dodin, « les résistances du patient, mais aussi des soignants, ainsi que les difficultés à intégrer ces approches corporelles dans une vraie synergie avec les autres modalités du soin. »
Le travail avec et par le corps, une approche en expansion
La psychiatre allemande Hilde Bruch fut la première à mettre en évidence la dissonance entre la réalité anatomique et l’image du corps chez les patientes atteintes d’anorexie mentale. Elle définit cette expérience aberrante du corps comme un désordre de l’image corporelle, de l’interprétation perceptive et cognitive du corps, accompagné d’un sentiment d’inefficacité pour soi-même. Depuis lors, l’anorexie mentale est considérée comme un exemple typique de l’image perturbée du corps. Une condition indispensable au rétablissement des patientes souffrant de désordre alimentaire est donc la reconstruction d’une image réaliste et positive de leur corps.
Les thérapies psychomotrices, intégrées dans un traitement multidimensionnel, sont une des voies possibles pour rétablir cette image. En France, depuis une dizaine d’années, de nombreuses approches thérapeutiques ont été développées, basées sur des pratiques de relaxation, des exercices de respiration, de confrontation par vidéo et miroir, des exercices physiques, de la danse…
Prendre de la distance avec le mental exclusif
Il est maintenant tout à fait établi et vérifié par les cliniciens spécialisés que les approches corporelles doivent faire partie du projet thérapeutique dans les troubles des conduites alimentaires.
Source : m.epochtimes.fr
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